Le tram 12 à la Corraterie (1946)
Éditeur | : Amateur | N° de carte | : - |
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Commune | : Genève | Lieu-dit | : Rue de la Corraterie |
Le tram 12 emblème des transports publics genevois arrive en bas de la rue de la Corraterie, en provenance de Carouge et va s’engager dans les Rues Basses pour rallier Moillesullaz et Annemasse, alors que les nombreux piétons n’hésitent pas à traverser la chaussée dans les passages qui étaient réellement cloutés à l’époque.
Cette ligne de tramway est non seulement la plus ancienne ligne d’Europe encore en activité, étant la seule qui ait résisté à l’essor de la voiture et du bus, elle a aussi été un témoin privilégié de l’histoire urbanistique, sociale et humaine de Genève. La ligne 12 démarre le 19 juin 1862, lorsque le premier tram de Suisse, alors tracté par des chevaux, s’élance sur son parcours d’origine entre la place de Neuve et Carouge, (remplaçant un omnibus hippomobile étrenné en 1833, mais dépourvu de voie ferroviaire), avant d’être électrifiée en 1885. Elle relie la Genève protestante à la catholique Carouge depuis 1862 et, après diverses extensions, elle étend la ville et parcourt des tracés antiques, menant jusqu'à Saint-Julien, Annemasse et au-delà, et y draine le commerce, l’immobilier, l’industrie, et toute l’activité en général. Grâce à divers entrepreneurs, tous privés et souvent étrangers, le réseau genevois se développe jusqu’à devenir le plus dense du continent. Toute cette évolution ne se fait pas sans heurts et au XXe siècle, le tram 12 se retrouve au cœur de nombreuses grèves, faisant de Genève un haut lieu du syndicalisme. Qui sait encore que la grogne des wattmen genevois contre leur directeur américain a provoqué, en 1902, la première grève générale du pays ? Au départ, le tram était un agrément qui permettait aux élites et aux touristes de voir la ville autrement, mais avec l’essor de la voiture dans les années 1930 il devient le moyen de transport de ceux qui n’ont pas accès à l’automobile : les enfants, les pauvres et les personnes âgées. Au XXe siècle les trams de campagne permettent le développement de grandes zones villas… qui vont ensuite se retourner contre le tram quand les propriétaires de villas s’équipent de voitures. Ainsi, dans les années 1950 et 1960, Genève démantèle presque entièrement son réseau, pour faire place à l’automobile. Seul le tram 12 sauve sa peau durant cette période où les pontes de l’urbanisme prônent sérieusement de changer en autoroutes les quais du centre-ville, en reléguant les piétons dans des souterrains. Actuellement, Genève redéploye à grands frais son réseau aboli et la région s’efforce de corriger les multiples ratages ferroviaires qui ont marqué son passé.
Cliché de Roger Hauert - Collection Bernard Hauert.